mardi 30 décembre 2008

MIEUX COMPRENDRE

Parc Louango - Burkina Faso

Mieux comprendre les raisons de l'écart considérable en France entre la demande potentielle et l'activité constatée*: Notre Chaire a fait réaliser une enquête qualitative sur les freins et leviers au développement de la micro-activité et du microcrédit dans un quartier défévorisé à Nantes.
L'échantillon était modeste, mais la convergence de certaines opinions me semble permettre quelques conclusions hiérarchisant les facteurs.

Le paysage ainsi esquissé s'avère plutôt sombre:

Beaucoup de personnes auraient certes envie de créer leur propre activité, elles ont une bonne opinion des créateurs, mais elles s'expriment sur un mode plus proche du rêve que du projet.
En tout état de cause, elles reculent devant les obstacles, parmi lesquels le premier réside dans l'impossibilité de "savoir à qui s'adresser" malgré - ou à cause de ? - la profusion d'organismes sensés les appuyer.


En outre, elles répugnent à s'engager, avec leur famille, dans les responsabilités d'un emprunt à terme: Le crédit est davantage perçu comme un élément dangereux que comme facteur de consolidation du projet.

Le microcrédit reste pratiquement inconnu. Une fois expliqué, il recueuille toutefois un certain coefficient de sympathie.

Une restitution plus complète des résultats de l'enquête est disponible sur le site http://www.microfinance.audencia.com/ .



Pour ma part, j'en retire le sentiment qu'il conviendrait de s'appuyer davantage sur les sensibilités et les aspirations des personnes susceptibles d'être concernées par la création de leur propre activité.
"Plus la piste est longue, plus compte le premier pas" (proverbe Burkinabe).



*: à consulter: Très bonne étude de l'ADIE sur la demande potentielle en France:
http://www.adie.org/presse/etudesdispo.php

samedi 20 décembre 2008

DECISIONS POUR UN PROGRAMME

Ce 10 décembre, réunion bi-annuelle du Comité de Pilotage de notre Programme de Recherche-Action en Microfinancements.


Le constat s'avère plutot encourageant: Deux années de travaux scientifiques pour étudier l'application à la microfinance des théories économiques modernes ont permis au travers de divers "papiers" d'en cerner certaines spécificités marquantes et une partie des facteurs-clé de succès, tandis qu'était lancée avec l'Adie et la Banque Populaire Atlantique une expérimentation originale sur un quartier défavorisé à Nantes.


Pour 2009, le focus sera mis sur les voies de développement de la micro-activité et du microcrédit en France, en conservant un bon support académique ainsi que l'éclairage des réalisations dans le monde. Un effort de communication sera entrepris, notamment via le Site http://www.microfinance.audencia.com/.


Ce Programme est original à bien des égards: fondé sur un partenariat entre une Grande Ecole et un Groupe Bancaire, il fait appel tant à des chercheurs qu'à des praticiens, et vise à des résultats aussi bien opérationnels que académiques.


Dans l'actualité financière économique et sociale , ses membres sont extrèmement déterminés à "pousser les feux",
et veulent croire à une année 2009 propice aux micro-entrepreneurs pauvres en France et dans le monde!

lundi 8 décembre 2008

M. YUNUS, M. HIRSCH, et HEC: "Quand la mer monte, tous les bateaux montent"?



Ce 6 décembre, le théatre Marigny est plein à craquer. HEC lance sa chaire "Social Business / Entreprise et Pauvreté", co-présidée par Martin HIRSCH et Le professeur YUNUS, qui nous racontent des choses passionnantes dans le contexte de crise financière.

J'en retiens surtout ( en vrac):
"Quand la mer monte, tous les bateaux montent"? Hmm...Le libéralisme économique a certes généré une prospérité assez généralisée, mais débouche sur une crise grave, qui affectera principalement les plus pauvres.

La micro-activité et le microcrédit sont enfants du libéralisme, qui prône l'esprit d'entreprise, tout en affichant leur spécificité: leur formidable développement repose historiquement sur un objectif double, à la fois économique ET social: M. Yunus propose le concept de "business social": la performance au bénéfice de tous. Un exemple pour une future version du libéralisme?

Dans la crise, ce sont les plus prestigieuses institutions financières qui ont disparu, pas les IMFs. Il est encore trop tôt pour les imaginer à l'abri de la contagion, mais on peut, face à la faillite des exigences règlementaires et des systèmes de contrôle, se demander où la confiance est la mieux placée? précisément, la gestion à double objectif économique ET social se révéle un excellent garant vis à vis des épargnants.

Le microcrédit, c'est le contraire des subprimes: Il s'agit de financer l'initiative économique des pauvres, et pas leur sur-endettement spéculatif !
Mais laissons au microcrédit son humilité, sa discrétion, sa souplesse, sa créativité.
Et sa simplicité.

Une grande ovation clôture la séance; ces thèmes mobilisent un public ouvert et soucieux d'agir dans la crise!


Autre chose: C'est un vrai plaisir de vous annoncer l'ouverture du Site de notre Chaire en Microfinance: www.microfinance.audencia.com (cf lien ci-joint).

Bonne visite,
et joyeux noël!

samedi 15 novembre 2008

Entretien avec Farida Abid: Une personalité!


Farida Abid, 34 ans, de famille d’origine Kabyle, est passée par toutes sortes de galères mais a toujours voulu s’investir dans une activité indépendante fondée sur son goût pour le vêtement. Elle s’est lancée il y a 3 ans dans la création et la fabrication de modèles. Sa sœur Yasmina et son amie Sandra l’ont rejointe courant 2008. Elles vivent de leur activité – en travaillant dur – et viennent d’embaucher une personne en situation de précarité.

Farida nous a livré son point de vue sur la création d’ auto-emplois en quartier difficile :
« Beaucoup de personnes subissent les évènements de la vie sans être acteurs de leur sort et vivent dans la méfiance : En exemple, ces volets éternellement clos de familles pourtant en France depuis des dizaines d’années…
Les structures sociales ne sont pas toujours bien perçues : relation infantilisante, manque d’aptitude à discerner un projet sérieux d’autonomie. Elle en a fait l’expérience.
Les associations sont plutôt dans le quotidien, le lien social, le dépannage.
Une piste : Les mamans, certes peu ouvertes sur l’environnement, mais solides et portant la valeur travail.
Il y a une demande latente, mais les gens auraient besoin d’un référent de confiance, désintéressé, humble, capable de leur ouvrir l’envie de créer leur propre emploi et ensuite de les aider dans les démarches administratives. »

Point de vue qui donne à réfléchir ! Surtout lorsqu’on le rapproche des études sur cette demande potentielle en France, qui pourrait être estimée à cinq fois les réalisations annuelles de microcrédits.Une note d’espoir tout de même : L'activité se développe à un rythme soutenu.

Crédit photo: Philippe Anessaut

dimanche 28 septembre 2008

Réaction: Article paru dans La Presse


Notre Chaire a publié le 9 septembre un article dont le titre a été malencontreusement modifié et le texte tronqué. Ainsi est-on passé de: "Microfinance: capital-risque contre risques du crédit",
à: "Le microcrédit, une solution dépassée",
ce qui déforme clairement le point de vue des auteurs,
tandis que l'invitation au débat et à la créativité contenue dans la dernière phrase était supprimée.

Je suis partisan de ces travaux de recherche même si leurs conclusions peuvent provoquer, car ils viennent stimuler la réflexion et l' invention: Le papier incriminé avait d'ailleurs déjà fait l'objet d'un "post" dans ce blog.

Sur le fonds, il me semble légitime de s'interroger -et la recherche le fait avec son style propre - sur les avantages d'interventions en fonds propres au bénéfice des micro-entreprises. Au plan pratique, le sujet est complexe nous le savons. d'où l'intérêt d'ouvrir un débat.

Je ne reprends donc pas à mon compte le titre choisi par la revue: La microfinance est loin d'être dépassée, et au contraire nous aimerions la voir beaucoup plus développée en Europe de l'Ouest.

Ne nous trompons pas de combat!

lundi 22 septembre 2008

L'EUROPE AVANCE AUSSI

Congrès du Réseau Européen de la Microfinance:
La Commission Européenne présente son "Initiative pour le Développement du Microcrédit": C'est indéniablement une reconnaissance de l'importance du secteur au regard de la stratégie de Lisbonne avec mise en place de moyens nouveaux, plus particulièrement tournés vers les Institutions de Microfinance.

Une question: Pourquoi les réalisations de microcrédits en Europe de l'Ouest demeurent-elles aussi modestes en nombre? En analysant mieux les facteurs explicatifs, ne pourrait-on améliorer la portée des diverses "initiatives"?
Nous allons modestement prendre celle de lancer une étude dans le cadre de notre Programme de Recherche-Action (cf le post 1).


Moment d'émotion lorsqu'est annoncé le départ de Maria Novak de sa charge de Présidente de ce Réseau, qu'elle a fondé.

vendredi 25 juillet 2008

MYRIAM avance

L'expérimentation à Nantes se met en place. jJe rencontre Myriam, marocaine, la cinquantaine souriante, dans les locaux de son association de quartier à Malakof, nantes.
Myriam a 2 enfants, dont une fille à la Fac; elle-même est quasiment analphabète, et a poussé ses enfants à l'Ecole.
Il y a quelques années, elle a, sur demande de sa fille qui effectuait un stage dans une manifestation culturelle, approvisionné celle dernière en gâteaux marocains: Devant les félicitations et les encouragements, elle s'est lancée en proposant ses gâteaux aux stations du tramway, avec un cadie.
Ensuite, elle s'est fait accepter sur quelques marchés, ce qui l'a amenée à demander et obtenir un microcrédit de l'Adie pour l'achat d'une voiture d'occasion et d'un petit étal.
Un problème lancinant: Le logement: Cher (700 euros) et malcommode (cuisine exigüe pour la fabrication des gâteaux et l'entreposage des matières premières, qu'elle fait venir de son pays).
Un projet:Franchir une nouvelle étape, avec l'investissement dans un camion de marché.
Une difficulté: Elle ne peut se débrouiller seule avec les imprimés et papiers de toute sorte.
Un espoir: Elle m'explique qu'elle commence à avoir une clientèle régulière de particuliers et quelques restaurateurs; elle est à jour de ses échéances de prêt, lequel arrive en fin de remboursement..
Conclusion: On va organiser un nouveau contact avec l'Adie, ainsi qu'avec la Banque Populaire, qui souhaite développer ses interventions en microfinancements dans le cadre de l'expérimentation sur le quartier.

Je trouve ce parcours très encourageant pour notre démarche!

L'identité réelle de Myriam a été occultée dans cet article.

vendredi 23 mai 2008

Perplexité devant la microfinance en Roumanie!



Visite d'Institutions de Microfinance en Roumanie, organisée par l'EMN (Réseau Européen de la Microfinance):


Avec le secret espoir d'y découvrir la recette d'un développement significatif qui pourrait s'avèrer assez facilement transposable en France compte tenu de la proximité culturelle.


Et voilà: Nous avons vu des clients à profil de SME, des Institutions focalisées sur leur réussite financière, les uns et les autres avec de beaux succès indéniablement.

Mais il faut au moins 6 mois d'existence à une entreprise pour accéder à un crédit, certaines origines ethniques ne sont pas recevables, l'impact social des opérations n'est pas considéré - hormis l'effet sur l'emploi. La concurrence avec les banques est frontale ( et tourne en faveur des IMF), les similitudes commerciales s'avèrent frappantes.

La plupart des IMF se présentent comme si elles cherchaient à convaincre des investisseurs; et elles y sont probablement contraintes par le retrait progressif des donateurs et le poids croissant d'une règlementation exigeante.


Alors:

-d'un côté, l'action menée est certainement très utile dans ce pays encore émergent économiquement; les IMF sont en pleine professionalisation.

-de l'autre, la mission d'appui aux populations pauvres parait bien lointaine (malgré quelques pétitions de principe).



Pour ma part, je ne puis taxer d'hérésie un mouvement pragmatique et porteur pour son environnement.
Mais je reste bien perplexe quand aux facultés de le décliner en France.

mercredi 30 avril 2008

Les dirigeants d'Institutions de Microfinance ne mettent pas le risque sur crédits au premier plan de leurs préoccupations

L'étude "Microfinance Banana Skins" réalisée en Mars 2008 par le Centre for the Study of Financial Innovation pour le compte du CGAP auprès de 350 institutions de bonne qualité montre que le facteur "risques sur les crédits" vient au 10ème rang dans leur classement des "top 29 risks" qu'ils ont à maitriser, le premier étant la qualité du management.

Cette perception est à rapprocher de l'analyse de la base Mix-Market effectuée par M. Yossoupov - cf point No 3 du blog -: Il montre que le facteur "maitrise des risques" s'avère dans les faits le plus discriminant en termes d'équilibre financier des IMF.
Décalage entre perception et réalité? ou peut-être un signe de maturité?

mardi 19 février 2008

Les "Welfarists" contre les "Institutionalists"

Dans un papier en date du 16 janvier 2008, Nurmukhammad Yusupov, étudiant doctorant à Audencia, s'intéresse au débat récurrent qui agite le monde de la microfinance, quelque peu écartelée entre les tenants de la lutte contre la pauvreté et ceux qui soutiennent l'objectif de soutenabilité financière pour leurs institutions.
Il préconise le développement d'une véritable théorie de la microfinance, qui viendrait conforter les compétences du management concerné.

La tendance me semble être à une rapide professionnalisation d'un bon nombre d'IMF; certaines affichent d'ailleurs des performances économiques remarquables.
Ce constat ne vide toutefois pas le débat, et la mesure de la performance sociale des IMF apparait comme un enjeu nouveau.

vendredi 1 février 2008

Aller sur le terrain - Point No 4 janvier 2008

Lancement d'une expérimentation sur le quartier de Bellevue à Nantes.
Je suis convaincu, à la suite de Mohamed YUNUS, qu'il y a autant de capacité entrepreneuriale chez des personnes en situation défavorisée que dans l'ensemble de la population.
Mais la demande spontanée en pays développé reste encore faible.
Comment faire émerger les motivations individuelles?


Publications:
-Rapport sur la microfinance à nantes.
-Microcredit demand assesment methodology,
-Microfinance: Hierarchical organisation and practice


Participation au Global Microfinance Investment Congress organisé par Planet-Finance:
La volonté d'intervention des grands investisseurs internationaux, notamment au titre de fonds socialement responsables, est claire et leur volume devient progressivement significatif. Les actifs en microfinance sont estimés décorellés des fluctuations boursières.
L'abondance de capitaux ne risque t'elle pas de générer un certain laxisme à la mode "subprime"?



Des IMF viables? - Point No 3 octobre 2007

Les déterminants de la viabilité financière des institutions de microfinance (Mémoire rédigé par M. Maty Sene, dirigé par le professeur Ayayi):

La qualité de maîtrise des risques reste le facteur le plus discriminant dans les performances financières des IMF, avant d' autres facteurs tels que le niveau des taux d'intérêt, les charges salariales, l'organisation, etc.

Le niveau de risques observé peut s'avérer moins élevé que celui de crédits commerciaux classiques.
Reste à savoir comment procèdent les institutions les plus performantes, et la compatibilité avec leur mission sociale.


Participation à la conférence de l'European Microfinance Network à Berlin:

Maria Novak critique vivement les dispositifs forfaitaires de prélèvements sociaux lorsqu'ils aboutissent à confisquer des pourcentages abusifs du modeste chiffre d'affaires réalisé par une personne qui démarre son activité.
On peut même se demander si le système ne conduit pas à encourager le travail au noir!

Deux publications qui décoiffent... - Point No 2, Mai 2007

Deux nouvelles publications:

A. Ayayi : "Microfinance: Debt or Equity? What are the implications for social welfare?": Le Professeur Ayayi démontre que l'intervention d'une institution financière sous forme de fonds propres est plus judicieuse que par le crédit.
Théorie particulièrement percutante, qui ouvre un vrai débat!


A. Ayayi et C. Noël d'un papier: "Défis et perspectives de la recherche en microfinance": La recherche reste embryonnaire en europe, et de nombreuses thématiques demandent un approfondissement.

Lancement d'une recherche sur les microfinancements

Janvier 2007
Lancement d'un Programme de Recherche-Action en Microfinancements.

Programme tri-annuel co-piloté par Audencia-Nantes, Ecole de management, et le Groupe Banque Populaire.
L'objectif est d'évaluer les facteurs de succès économique et social et les voies de progrès des microfinancements pour les diverses parties prenantes.
La démarche est double: académique et expérimentale. Elle couvre tant les pays émergents que les pays développés.
L'implication des Banques Populaires s'inscrit dans la fidélité à leurs racines et leur engagement auprès des petites et toutes petites entreprises.
Pour Audencia, signataire du Pacte Global de l'ONU, il s'agit d'enrichir la connaissance internationale sur un champ d'importance majeure.
Les deux promoteurs espèrent ainsi contribuer à proposer des solutions à nos problèmes de société.

Ce blog, produit à titre personnel par le coordinateur du Programme, vise à tenir informées les personnes intérressées sur la démarche en cours et à offrir une plateforme d'échanges et suggestions se rapportant à son objet.
Les productions académiques ou leurs abstracts peuvent être consultés en s'adressant à Christophe Villa, directeur scientifique du Programme: chvilla@audencia.com.